Le souci du détail

À l'occasion du déploiement de la gamme d'accessoires BG pour guitares, Franck Bichon a été interviewé par Ludovic Egraz ( magazine Guitare Xtrem ).

  

L’entreprise familiale du créateur et entrepreneur Franck Bichon ne cause pas encore beaucoup aux guitaristes, mais il est important de noter que cet acteur relativement nouveau dans le monde de la sangle pour guitare et basse est devenu en plus de trois décennies l’un des leaders au niveau des accessoires haut de gamme pour instruments à vent, avec des produits qui sont diffusés dans 85 pays.

La qualité, l’originalité et la durabilité sont les maîtres-mots de la société lyonnaise, et les straps BG France commencent à se frayer un chemin dans l’arsenal de quelques musiciens de premier ordre (le blues rockeur Fred Chapellier et Cyril "C.C." Roger de Shaka Ponk), mais font également l’objet de collaborations avec des luthiers (récemment avec nos amis de Pistol Guitars, également présents dans ce numéro spécial). Guitare Xtreme Magazine a causé avec Franck, qui a répondu à nos questions en direct de la Convention de la Texas Music Educators Association qui se tient chaque année à San Antonio. Moteur !

« Si une entreprise comme la nôtre parvient à résister face aux Chinois, c’est parce que nous proposons de la qualité. »

Franck, peux-tu nous résumer brièvement ton parcours ? 

J'ai fait des études dans la comptabilité et la gestion du personnel, puis j'ai travaillé en discothèque, dans le monde de la nuit. Très vite, j'ai senti que travailler pour quelqu'un n'était pas fait pour moi et que je devais mener ma propre barque. J'ai monté une agence de pub qui marchait très bien, et puis un jour, mon père, qui était prof de saxophone à Lyon, m'a montré un système de ligature qu'il avait imaginé. Il m'a demandé si je voulais travailler dessus et m'en occuper. Je lui ai répondu : « Oui, mais si j'accepte de le faire, alors il faut que je devienne le numéro un mondial en accessoires de qualité pour instruments à vent. »

 

Je ne savais rien faire, j'étais totalement autodidacte, mais je me suis lancé au début des années 80 et comme je parlais un peu anglais, j'ai pu faire des rencontres, comme au Musikmesse de Francfort. De fil en aiguille, j'ai ainsi développé toute une gamme d'accessoires pour instruments à vent : cordons, écouvillons, sèche-tampons et accessoires. 

 

 

Ce sont des métiers qui ne s'improvisent pas. Comment as-tu fait? 

J'aimais créer et ce que je ne savais pas faire, je le faisais faire. J'ai embauché au fur et à mesure et en fonction de mes besoins des personnes très compétentes dans des domaines bien précis, que ce soit pour le travail du métal, mais aussi pour la maroquinerie. Nous réalisons tous les prototypes de nos produits en interne et pour la production des articles en cuir, nous faisons appel à une société qui travaille entre autres pour Vuitton et Hermès. 

Quel est le statut de BG France à l'international ? 

Pour commencer, il faut préciser que BG France s'est vu attribuer le label EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant) et a obtenu plusieurs prix qui ont récompensé notre savoir-faire et notre volonté d'innover (Prix Artinov en création, Grand Prix Fondexpa à l'export).

 

Pour répondre à la question, nous sommes l'entreprise proposant la gamme d'accessoires la plus complète au monde, en tant que concepteur et fabricant, et nous nous positionnons parmi les leaders en accessoires à côté de boîtes centenaires. Nous sommes aussi sous-traitants pour de nombreuses marques d'instruments, si bien que nous fournissons actuellement la majorité du marché mondial de fabricants d'instruments à vent. 

 

 

Parlons un peu des sangles pour guitare. Quand as-tu commencé à en fabriquer ?

J’ai commencé à en faire quelques-unes il y a une vingtaine d’années, mais à cette époque, les gens voulaient acheter les sangles de leurs marques de guitares préférées, Fender et Gibson en tête de liste. Les produits vendus par ces majors étaient peu qualitatifs, souvent du PVC imitation cuir, mais les gens achetaient quand même. Les mentalités ont changé progressivement, et depuis cinq ans, je me suis mis à retravailler la gamme, en m’assurant de proposer des produits de qualité et surtout durables. C’est très important, parce que si une entreprise comme la nôtre parvient à résister face aux Chinois, c’est parce que nous proposons de la qualité. 

 

 

As-tu consulté des guitaristes pour créer tes sangles ? 

Non, dans un premier temps, je ne voulais surtout pas les écouter, parce qu'ils m'auraient demandé de reproduire ce qui existait déjà, ce qui n'aurait pas présenté un grand intérêt. Je voulais partir de sangles qui soient ma signature, avec mon savoir-faire, et qui répondent à notre slogan : « Quand les détails font toute la différence. » Seulement ensuite, je suis allé à la rencontre de musiciens de scène très sollicités et exigeants. Mon idée était de proposer un produit que les autres n'avaient pas. Nos sangles apportent un confort supplémentaire au niveau de l'épaule, avec une lanière en Polaire et une autre en éponge pour absorber la transpiration, ainsi qu'une surface antiglisse pour la stabilité. Enfin, il y a un « pick pocket » pour ranger les médiators. Toutes ces choses ont été testées et ajustées au fur et à mesure, afin d'atteindre une certaine perfection. La gamme actuelle comprend deux largeurs de sangles et six coloris. Il y a peu de références, mais elles sont toutes très abouties. Nous pouvons faire du custom. Nous réalisons aussi des étuis en cuir pour les systèmes HF, que l'on fixe soit sur la sangle, soit à la ceinture. Notre gamme de produits pour guitare comporte également des gants et des tissus de nettoyage, des housses souples pour protéger les instruments lorsqu'ils sont posés sur un stand, et des « inside case covers ». Ces produits sont réalisés en microfibre sans additif chimique, un matériau qui absorbe l'humidité et qui ne raye pas la surface de la guitare. 

 

 

Pour des produits haut de gamme, tu proposes des tarifs assez contenus. Comment y parviens-tu ? 

Déjà, je ne passe pas par un distributeur, ce qui réduit considérablement les coûts. Je vends directement aux boutiques et puis je ne prends pas une marge très élevée, parce que je me considère comme un nouveau venu en phase d'apprentissage dans le monde de la guitare et de l'instrument à cordes. Je préfère proposer aux gens un bon rapport qualité / prix afin qu'ils choisissent nos produits. C'est aussi pour cette raison que je fais beaucoup de salons, pour apprendre le métier, voir les autres fabricants et rencontrer les musiciens pour « sentir le truc ».

 

Chaque famille d'instrumentistes possède une typologie et une mentalité bien particulière. C'est tout un apprentissage. Moi, je suis un dinosaure. Je me suis construit à une époque où les téléphones portables et internet n'existaient pas. Le business était basé sur de vrais rapports humains et il fallait écouter ce qu'il se passait pour comprendre les gens et leurs besoins. C'est la meilleure façon de progresser, de se remettre en question, de coller au plus près aux besoins des gens. 

 

Par Ludovic Egraz ( IG : @ludovicegraz )

Crédits : GuitareXtreme ( IG : @guitarextrememagazine )

Photos : Sébastien Boulard ( www.sebastienboulard.com )

 

ENTRETIEN DE FRANCK BICHON